Trois lauréates grenobloises pour le Prix Jeunes Talents Pour les Femmes et la Science France 2022

Distinction / Prix Recherche
le  12 octobre 2022
Adeline Lacroix, Louise O’Connor et Alexandra Colin, les trois chercheuses grenobloises lauréates d’un prix Jeunes Talents Pour les Femmes et la Science France 2022 de la Fondation L’Oréal
Adeline Lacroix, Louise O’Connor et Alexandra Colin, les trois chercheuses grenobloises lauréates d’un prix Jeunes Talents Pour les Femmes et la Science France 2022 de la Fondation L’Oréal
Afin de valoriser l’excellence scientifiques des jeunes chercheuses françaises, la Fondation L’Oréal, en partenariat avec l’Académie des sciences et la Commission nationale française pour l’UNESCO, décerne chaque année depuis 2007, les Prix Jeunes Talents Pour les Femmes et la Science. Portraits de trois jeunes chercheuses grenobloises qui comptent parmi les 35 brillantes lauréates 2022.
« Nous ne pouvons pas avancer si la moitié de l’humanité est laissée pour compte. Sans les femmes, aucun progrès n’est possible. Nous devons les encourager, les rendre visibles, leur donner les moyens de lutter contre les obstacles existants et leur permettre d’inspirer les générations futures » rappelle Alexandra Palt, directrice générale de la Fondation L’Oréal, lors du Sommet 2022 sur la transformation de l’éducation au siège des Nations unies en septembre dernier.

Des chercheuses brillantes et engagées

Pour la 16e édition du Prix Jeunes Talents France, la Fondation L’Oréal et ses partenaires réaffirment leur engagement aux côtés des femmes scientifiques, afin de les accompagner, les rendre visibles, et soutenir leurs recherches. Cette année, 23 doctorantes et 12 post-doctorantes ont été sélectionnées en France parmi 660 candidatures éligibles par un jury d’excellence composé de 28 chercheuses et chercheurs de l’Académie des sciences. Parmi elles, deux doctorantes et une post-doctorante grenobloises.

Trois jeunes chercheuses grenobloises récompensées racontent leur parcours

Portrait Louise O'ConnorLouise O’Connor

Doctorante UGA en Sciences de la vie et de l'environnement
LECA (CNRS/UGA/USMB) - ED CSV
« Les changements environnementaux en cours risquent de provoquer une réorganisation profonde du monde vivant »

Après un bac S, section SVT, j’ai fait une classe prépa BCPST au Lycée du Parc à Lyon. Puis en 2015, j’ai intégré l’École normale supérieure à Paris en biologie, où je me suis spécialisée en écologie et évolution et sciences de l'environnement. Au travers de mes études et de plusieurs stages en laboratoire de recherche, j’ai appris énormément sur la double crise environnementale en cours : le changement climatique et l’érosion de la biodiversité. J’ai eu envie de m’orienter dans ce domaine de recherche pour mieux comprendre les causes de l’érosion de la biodiversité et pour chercher des solutions. Aujourd’hui, je fais une thèse en biogéographie et sciences de la conservation au Laboratoire d’écologie alpine. J’associe l’étude des réseaux d’interactions entre les vertébrés terrestres en Europe avec leur répartition géographique pour mieux comprendre les menaces qui pèsent sur ces espèces, et les solutions pour les préserver via de nouvelles aires protégées.

Je suis très honorée d'avoir reçu ce prix Jeunes Talents L’Oréal-UNESCO, et d'avoir rencontré une communauté de chercheuses brillantes et inspirantes. C'est une immense reconnaissance de mon travail, qui m'encourage à poursuivre la recherche à l’interface entre l’écologie fondamentale et les sciences de la conservation, avec l’objectif de mieux informer les politiques de protection de l’environnement. Les femmes en sciences se heurtent à des obstacles que les hommes n’ont pas. Les femmes scientifiques sont généralement oubliées dans l'histoire des sciences et elles obtiennent très rarement une récompense à la hauteur de leurs contributions. En récompensant des chercheuses au moment charnière de leur carrière, entre la thèse et le post-doctorat, ce prix permet de changer les mentalités, d'encourager les femmes à se projeter dans la recherche, et nous aide collectivement à aller vers une meilleure représentation des femmes dans le monde académique.

Portrait Adeline LacroixAdeline Lacroix

Doctorante UGA en Sciences Biologiques
LPNC (CNRS/UGA/USMB) - ED ISCE
« Contribuer à un monde plus tolérant face à la différence »

Dans ma thèse, j’ai étudié si les difficultés de traitement des visages des personnes autistes pouvaient être en partie liées à des particularités perceptives. Je m’intéresse aussi aux différences liées au sexe et au genre dans l’autisme. En effet, de plus en plus de travaux révèlent que les filles et femmes autistes présentent des caractéristiques plus discrètes que les garçons, ce qui pourraient les conduire à être sous-diagnostiquées. Mettre en avant ces différences est essentiel pour mieux repérer et accompagner les femmes autistes. Bien que j’en parle peu dans le cadre professionnel, ce sujet me tient à cœur puisque j’ai moi-même reçu un diagnostic tardif de syndrome d’Asperger. Certaines de mes particularités rendaient difficile mon travail de professeur des écoles. Désirant contribuer à une meilleure compréhension de l’autisme et de femmes autistes, j’ai souhaité réaliser ma reconversion dans le domaine de la recherche.

Ce prix est avant tout une reconnaissance de mes travaux scientifiques. Il est difficile d’évaluer soi-même son travail et malgré des publications dans des revues à comité de lecture, on peut avoir l’impression de ne pas être « à la hauteur ». Ce manque de confiance est plus présent chez les femmes, comme l’indiquent certaines recherches. Ainsi, lorsque notre travail est reconnu par un jury d’éminents scientifiques, c’est une aide pour prendre confiance mais aussi pour notre futur professionnel dans la recherche. Par ailleurs, ce prix est une réelle opportunité de montrer l’importance des femmes dans les domaines scientifiques. Enfin, il permet de créer des liens et d’échanger avec des femmes scientifiques dans des domaines très variés ce qui a une valeur inestimable.

Portrait Alexandra ColinAlexandra Colin

Post-doctorante CEA en Chimie
LPCV (CEA/CNRS/INRAE/UGA)
« Mon moteur dans la vie : faire avancer la connaissance afin de mieux comprendre le monde qui nous entoure »

Pour moi, le déclic date du lycée, où la découverte de la molécule d'ADN m’a convaincue d’entamer des études de biologie. Au cours de mes études, j’ai ensuite été fascinée par l’utilisation des lois physiques pour mieux comprendre le vivant, ce qui m’a poussée à avoir un parcours interdisciplinaire. Pour ma thèse, je me suis plongée dans les assemblages dynamiques qui existent dans nos cellules. Ces assemblages, composés de plusieurs filaments qui forment le cytosquelette de la cellule, sont constitués de protéines qui s’auto-organisent pour aboutir à une fonction qu’elles n’auraient pas eue individuellement. Je développe donc de nouvelles méthodes pour comprendre comment cette auto-organisation régule de grandes fonctions cellulaires. Aujourd’hui au CEA, mes recherches utilisant une approche biomimétique m’ont permis de mettre en évidence les protéines nécessaires et minimales pour l’existence d’une dynamique auto-entretenue pendant plusieurs heures à partir d’un pool initial de matériel limité. À partir de cette reconstitution d’un cytosquelette ayant des propriétés dynamiques similaires à celles rencontrées dans les cellules, je pourrai ensuite complexifier le système pour tendre vers une cellule artificielle.

Ce prix représente une reconnaissance des travaux de recherche que j’ai effectués jusqu’à maintenant et il va me permettre d’augmenter ma visibilité au sein de la communauté scientifique. C’est aussi une opportunité incroyable pour rencontrer d’autre femmes scientifiques qui travaillent dans des domaines différents du mien et que je n’aurai donc pas rencontrées autrement.
De plus, aujourd’hui je mène de front ma carrière scientifique et ma vie familiale. Je considère que cette situation reste un challenge, où l'équilibre est difficile à trouver. J’espère cependant, avec mon exemple et ce prix, montrer aux plus jeunes que ces vies sont conciliables et que les femmes ont tout autant leurs places que les hommes dans la recherche, à tous les niveaux de responsabilité !
 
Portrait Rana El MasriRana El Masri, post-doctorante Inserm en biologie cellulaire à l’Institut Cochin (CNRS/Inserm/Université Paris Cité) également lauréate a effectué son doctorat à l’UGA / ED CSV au sein de l’IBS (CEA/CNRS/UGA) de 2016 à 2019.
Publié le  17 octobre 2022
Mis à jour le  17 octobre 2022